mercredi 4 février 2015

***Chic*** BD jeunesse, dernière escale de ce cycle

Quand il s'agit de quitter les bulles pour attraper au vol une nouvelle thématique, je clos à l'eau, voile de bichromie, ou tout simplement noir et blanc et crayon, je clos liens, sentiments, amitié et émotions. Je clos tout bleu aussi.
Cet été là de Jullian Tamaki et Mariko Tamaki. A la lisière de l'adolescence, Rose et Windy se retrouvent cet été là à Awago Beach, comme tous les étés depuis... Tout le temps ! Au moins depuis une douzaine d'années, leur âge. L'âge de regarder des films d'horreur, de ne pas avoir envie d'écouter les adultes, de ne pas vouloir être mêlé(e)s aux tensions parentales ; l'âge de regarder avec envie et curiosité, avec sentiments mêlés aussi, les plus grands, les adolescents, l'âge de vouloir presque basculer, tomber amoureuses, tout en mangeant des marshmallow, de la guimauve et toutes sortes de bonbecs. L'âge de faire ce bout de chemin qui rapproche de l'adolescence tout en n'étant pas encore dedans, celui de plonger, de faire de l'apnée, de se baigner, de creuser encore des trous dans le sable, de se faire peur, de jouer. L'âge de découvrir aussi que la vie peut être une souffrance, comme celle que ressent la mère de Rose qui pleure de n'avoir pas réussi à avoir un deuxième enfant ; comme celle de cette adolescente qui manque de se suicider, elle, parce qu'elle n'a pas choisi d'avoir dans le ventre ce qui s'y serait installé, c'est ce qui ce dit, dans la bande d'ados du coin. Voyage initiatique dans la pré-adolescence au cours d'un séjour d'été. Cet été là, les images, les scènes, les relations, les émotions se bousculent... Une BD dense et touchante, tracé de noir et de blanc, qui connaît parfois quelques lenteurs, nécessaires peut-être à façonner le rythme irrégulier des étapes franchies par les deux jeunes filles dont l'univers oscille entre naïveté, envie et nostalgie et qui décrit si bien cet entre-deux qu'est la pré-adolescence. Edition de grande qualité chez Rue de Sèvres.
Mona de Séverine Vidal et Mathieu Bertrand. Il parait qu'elle n'a pas souffert, qu'elle est morte sur le coup. Mona grimpe dans le train, casque sur les oreilles, direction Saint-Malo pour un dernier adieu à sa grand-mère. Mona, c'est Mo, pour tous. C'est Gaël qui l'attend à la gare... Gaël son premier amour, son premier chagrin d'amour aussi, son ami. "Gaël sera en retard, c'est sûr".  Il y a encore ça entre eux, c'est sûr. Cette fois-là. Ils se souviennent. Mona lui avait fait une grande déclaration, lui y avait vu un truc mignon. "Les caniches, c'est mignon, là c'était tragique". Pas sûr qu'elle s'en soit vraiment remise. Pas exclu que ce soit aussi pour cela qu'elle ne vive plus ici. Ici, il y a qui déjà ? Trop de monde réuni, pour l'enterrement de mamie. Les petites marées,  celles de ces émotions qui vont et viennent, celles qui sont toujours là, qu'il faut apprivoiser, celles qui ne sont pas des grandes marées, de la tempête, loin des grosses vagues qui se retirent trop loin, submergent, noient. Plans rapprochés, petites vignettes, nombreuses, pour une narration principale qui suit Mona, son retour, le lien à faire avec le présent, les gens, et ce passé chagrin d'amour qu'elle voit encore quand elle se regarde dans les yeux de Gaël. Est-ce ainsi que l'on dit au revoir définitivement à l'enfance ? Peut-être. Oui peut-être. Et peut-être aussi que les nœuds se délient enfin, avec la parole, avec les mots, peut-être aussi que quand Gaël saura dire à Mona son secret, et aux siens aussi, il n'y aura plus de ressac. En parallèle, le lecteur accède aux pages du journal intime de Gaël. Mais pas Mona, non, pas Mona qui parvient tout de même à apprivoiser ses émotions et ses souvenirs. Tirée de son court roman Les Petites Marées paru chez Oskar éditions, Séverine Vidal propose ici une BD très douce, intimiste, au sujet sensible qu'est celle du liseré fragile à l'adolescence qui sépare amour et amitié. Distillée dans l'eau de mer, à peine salée, distillée très habilement par des illustrations toutes bleues aux traits réalistes qui ne disent d'ailleurs presque pas un mot, cette BD parle aussi d'homosexualité et c'est finement mené, Mona est un BD illustrée par Mathieu Bertrand, éditée par Les Enfants Rouges.

*** Les références ***
Cet été là  de Jillian Tamaki et Mariko Tamaki - Editions Rue de Sèvres- mai 2014 -  € 20.- dès 11 ans.
 Mona - Les petites maréesde Séverine Vidal et Mathieu Bertrand - Editions Les Enfants rouges - octobre 2014 - 14 € - Dés 11 ans


Pour parler un petit peu de crêpes, puisque c'est de saison, je vous invite à mettre de l'eau dans votre pâte pour découvrir un roman qui se boit comme du petit lait.
Des crêpes à l'eau de Sandrine Beau, illustré par Sandrine Kao - Editions Grasset Jeunesse-  février 2014- 15,90 € - à partir de 8 ans *** coup de cœur ***
La chronique est Ici

1 commentaire: